Vous voulez savoir ce que j’aime bien dans la vie ? « Le chocolat ? » – Oui nan mais à part ça ? « Les lectures communes organisées par le Picabo River Book Club ? » – Oui GAGNÉ.
Chaque mois, Léa propose un ou deux titres en avant à lire pendant le mois et c’est l’occasion pour votre servante adorée de faire le plein de découvertes. Le mois dernier j’étais partie dans les terres reculées de l’Utah avec Désert Solitaire de Edward Abbey (dont je ne vous ai pas parlé, parce que voyez-vous, y a des lectures comme ça que je sens vouloir rester mon jardin secret et que j’avais envie de garder ça pour moi pendant un moment). Ce mois-ci, la lecture commune était À malin, malin et demi de Richard Russo (que je n’ai pas lu) et Nulle part sur la terre de Michael Farris Smith (que j’ai lu).
De quoi ça parle ton machin ?
Une femme marche seule avec une petite fille sur une route de Louisiane. Elle n’a nulle part où aller. Partie sans rien quelques années plus tôt de la ville où elle a grandi, elle revient tout aussi démunie. Elle pense avoir connu le pire. Elle se trompe. Russel a lui aussi quitté sa ville natale, onze ans plus tôt. Pour une peine de prison qui vient tout juste d’arriver à son terme. Il retourne chez lui en pensant avoir réglé sa dette. C’est sans compter sur le désir de vengeance de ceux qui l’attendent. Dans les paysages désolés de la campagne américaine, un meurtre va réunir ces âmes perdues, dont les vies vont bientôt ne plus tenir qu’à un fil.
Beauté, souffrance et abnégation
Après mes petits déboires littéraires ces temps-ci où niveau style et écriture je n’avais pas trop pris mon pied, Nulle part sur la terre est arrivé comme l’oeuf de Pâques en chocolat après 1 mois de régime. Un régal !
Le roman commence par deux silhouettes sur la route traînant un sac poubelle contenant tous leurs biens, une femme et sa fille, seules et perdues. Immédiatement, j’ai pensé au roman de Cormac McCarthy, Sur la route, que j’avais tout simplement aimé de tout mon coeur et qui racontait la marche longue d’un père et son fils dans un monde apocalyptique. Chez Michael Farris Smith, point de fin du monde, point de cannibalisme, on est chez nous à notre époque et pourtant l’impression de désolation est bien présente. Les figures humaines traînent dans leur sillage leur misère et leur malheur à l’instar de Maben et sa fille rattrapées par les démons, de Russel l’ancien taulard qui vient à peine de recouvrir sa liberté, de Larry l’enragé névrotique et dévoré par un désir de vengeance, et de Sarah l’ancienne fiancée engoncée dans son rôle de mère au foyer, tous semblent enfermés dans un circuit sans fin. Les personnages de Farris Smith sont fatalistes, cabossés par les tragédies et pourtant ils semblent, pour certains, éclairés et sans doute sauvés par l’humanité et la lumière d’espoir qu’y apporte l’auteur.
Nulle part sur terre est l’histoire d’une longue marche psychologique vers un endroit, un « quelque chose » de meilleur, traversée par les thèmes de culpabilité et de rédemption, thèmes forts attachés aux deux figures principales, Maben et Russel, empêtrés, englués dans la boue et les conséquences de leurs actions. Tandis que la violence, l’alcoolisme, l’inertie et le malheur profond peignent un portrait de l’Amérique des petits patelins et de certains rednecks ; des petites tranches de vie de personnages que Farris Smith, tel un Dr Frankenstein, donne vie avec une furieuse puissance.
Et tout ceci est passionnant. Le style ultra américain, encore une fois ressemblant à celui de Cormac McCarthy (les longues phrases et leurs conjonctions de coordination « et » sans fin) est hypnotisant et happe le lecteur dans la narration, dans le flot des pensées des personnages jusqu’au bout de leur chemin de croix. Dans la noirceur se dégage une lumière, ténue mais tenace. Même dans les pires moments, même dans les pires situations, l’humain peut prendre, doit prendre le dessus sur les mauvais coups du sort.
Malgré sa noirceur, il m’avait beaucoup plu !
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La comparaison avec McCarthy m’attire énormément, mais en même temps, comme grande fan du monsieur, ça m’effraie un peu. A essayer un jour pour se faire un avis !
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Moi j’aime bien lire tes chroniques, parce qu’elles ont trop la classe, bien qu’elles ne soient pas toujours très sympa avec mon portefeuille ^^
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<3 <3
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C’est clairement une lecture pour moi. L’avantage, c’est que c’est un poche, aussi ça me rend l’achat (un peu) moins coupable. :D
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Je crois qu’il a vraiment falloir que je rejoigne le Picabo River club. C’est la troisième fois que tu me donnes hyper envie de découvrir un bouquin proposé. Et d’ailleurs, les deux premières, j’ai acquis les livres juste à cause de ta chronique. J’espère que ça te remplit de fierté.
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