Marc Dugain a écrit un roman (parmi tant d’autres mais ma culture s’arrête là), La chambre des officiers, dont l’adaptation cinématographique est l’un de mes plus gros coups de coeur. C’est tout naturel que j’ai voulu me lancer dans la lecture d’un de ses livres. Pour voir. De mes propres yeux.
Kenner : À ne pas confondre avec la famille tout aussi tarée Jenner
Al Kenner est spécial. Très spécial. Déjà, sa taille gigantesque (2,20 mètres) ne le fait pas passer inaperçu. Il a une intelligence très supérieure au commun des mortels. Il ne ressent aucune joie et n’éprouve aucune émotion, mise à part une immense et dévorante colère. Et sa plus grande peur est de se retrouver dans une bagarre, la violence physique sur sa petite personne l’horrifiant. Bizarre, hein ? Ah mais attendez de voir le CV des parents, ou plutôt de la môman : alcoolique, acariâtre, violente, misandre, tyrannique et tous les autres adjectifs qui pourraient la qualifier de folle-dingue. Le père, quant à lui, ancien GI de la Seconde Guerre mondiale, est un mari démissionnaire et terrifié par sa femme. Ambiance de la famille, très chouette donc.
Le jeune adolescent est envoyé chez ses grands-parents paternels, sa génitrice ne voulant plus de lui à la maison, dans une campagne quelconque des USA. Un beau jour, la conscience d’Al Kenner craque, se fissure, explose et sur un coup de tête décide d’abattre ses grands-parents. Al a tenté l’expérience du meurtre pour la première fois de sa vie. En dépassant la limite, le jeune homme vient d’ouvrir les vannes à ses pulsions qui dès lors ne le laisseront plus jamais en paix.
Un « road-movie » touchant et viscéral
Le roman de Marc Dugain se pose là comme une sorte de road-movie littéraire, avec un anti-héros qui tente d’échapper à ses voix intérieures négatives et à la cruauté de sa mère qui a décidé pour lui dès sa naissance de sa nature monstrueuse. Sur sa route, Al essaye de comprendre, en portant un regard froid et critique, son monde en plein bouleversement (les conséquences de la guerre du Vietnam et le mouvement hippie qui en a découlé), mais aussi son prochain avec ses contradictions et ses espoirs. Mais en vain, car son passé génétique lui a enlevé toute possibilité d’approcher ne serait-ce que du bout des doigts le fait de se sentir humain, normal. Cette quête est vouée à l’échec, on le sait, on le pressent et pourtant on ne peut qu’être touché par les efforts déployés par Al pour se sauver. Jusqu’à ce qu’il lâche tout et qu’il devienne ce pour quoi sa terrible mère l’a élevé.
Sacrée histoire mais…
Marc Dugain nous offre une histoire glaçante emprunte d’une certaine humanité. Mais (forcément il y a un mais) pour vraiment aimer ce roman, il m’a manqué ce petit je-ne-sais-quoi, ce petit plus qui pimente ta vie, qui te fait pousser un soupir de contentement et de ravissement, qui te remue les entrailles. Ça vient en partie, je pense, de mon blocage avec le style de l’auteur. Aïe, tout ce que je n’aime pas dans l’écriture contemporaine francophone y est. Je remarque parfois dans les romans du moment qui font la joie de la rentrée littéraire, un syndrome stylistique particulier : sujet + verbe + complément et BASTA « croisons les doigts pour le Prix Goncourt ». C’est le genre de détail qui me rebrousse un peu les poils des bras. Je préfère de temps à autre une écriture qui se la pète concrètement mais qui te donne des frissons de plaisir (aka Les Bienveillantes de J. Littell, Les corrections de J. Franzen) à une écriture qui se la joue moderne et faussement simple.
En résumé, une lecture assez nuancée pour ma part. Je ne regrette cependant pas et je remercie l’enthousiasme de mes keupines de blogo pour m’avoir fait connaître ce roman.
Bon ça a l’air suffisamment taré pour me plaire sur le papier mais je dois avouer que le pitch ne m’emballe guère… : /
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En fait il y a pas mal de choses dans ce roman. Des petites intrigues, une certaine folie… Il se dévoile comme une effeuilleuse, en douceur, avec une fin en apothéose. A tenter je pense ! ;)
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Okay, Je note because I trust you !
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Et tu auras le droit de me taper si jamais tu n’aimes pas !
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